« Il faut choisir entre marché intérieur et export »
Après une semaine mouvementée fin août, Lactalis veut aller de l'avant et discuter prix et volumes avec les organisations de producteurs. Le groupe lance le débat sur le modèle laitier que souhaitent les éleveurs.
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Les prix de base que perçoivent les éleveurs ne correspondent pas à l'accord signé avec les organisations de producteurs. Pourquoi ?
Michel Nalet : Les prix de base de 280 €/1 000 litres en août jusqu'à 300 €/1 000 litres en décembre correspondent à une moyenne Lactalis France pondérée des volumes que Lactalis collecte dans chaque région. Cette moyenne est déclinée dans les régions à partir des grilles interprofessionnelles, d'où cette différence.
Pourquoi avoir pris le risque en août de décrocher votre prix de base par rapport à la concurrence française ?
M. N. : La négociation qui était en cours fin juillet avec les organisations de producteurs n'avait pas abouti. Nous nous sommes quittés sur un prix à titre conservatoire pour août. Ensuite, le syndicalisme s'est invité à la table des négociations. La semaine que nous avons traversée fin août montre aussi que nous avons changé de monde. Les médias ont pris le pas sur la construction durable, avec pour conséquence la stigmatisation de nos produits. Bref, on ne refera pas l'histoire. Ce qui nous intéresse, c'est demain.
Que répondez-vous aux OP qui regrettent de ne pouvoir établir un véritable dialogue avec le groupe Lactalis ?
M. N. : Le dialogue existe. Nous avons une dizaine de rencontres dans l'année avec les OP. Que le groupe Lactalis n'aille pas toujours dans le sens de leurs idées, c'est normal. Nous sommes dans un rapport client-fournisseurs. Chacun défend son modèle, mais nous souhaitons une relation privilégiée avec les producteurs. Cette construction ne se fait pas en un jour. Pour être dans un esprit de discussion, nous avons conscience qu'un niveau de revenu est indispensable aux producteurs. Le vrai sujet aujourd'hui, c'est le prix et le volume. Sur quelle base le monde laitier français veut-il rester ? On ne peut pas s'enorgueillir d'exporter l'équivalent de 9 milliards de litres, avoir une balance commerciale positive et, parallèlement, vouloir une valorisation du lait fondée sur le marché intérieur, décalée des prix de l'export qui sont volatils.
Selon vous, vers quel modèle d'exploitations laitières les producteurs doivent-ils tendre ?
M. N. : Ce n'est pas à Lactalis de le dire. Le groupe donne la possibilité, aux producteurs qui le souhaitent, de se développer via les attributions JA et les cessions de contrats. Pour sa part, Lactalis a une vision de développement international. Il ne pense pas qu'il faut faire régresser la collecte française au niveau de la consommation intérieure, mais il n'achètera pas plus de lait aux producteurs que ses outils industriels et ses marchés ne le permettent. Personne ne parle aujourd'hui des 340 000 tonnes de poudre mises à l'intervention, dont 100 000 tonnes environ pour la France. La part du groupe Lactalis à l'intervention est supérieure à la part qu'il collecte en France. Même si notre volonté n'est pas de travailler à l'intervention et que nous sommes plus exposés que la moyenne de nos concurrents, nous n'avons pas proposé aux producteurs une action volontariste de baisse des volumes. Chacun est libre.
Les OP souhaitent plus de transparence sur le mix-produit de Lactalis pour la fixation du prix et des volumes. Jusqu'où êtes-vous prêt à aller ?
M. N. : Il est exclu de faire des déclarations avant les discussions avec les OP. Une chose est sûre : il faudra tenir compte de la plus forte réactivité de l'Allemagne à l'évolution des marchés. On ne pourra pas être ad vitam aeternam 30 à 40 €/1 000 litres au-dessus de nos concurrents européens. Cette réactivité du prix du lait à l'amont n'est envisageable que si elle est possible à l'aval avec la grande distribution et la restauration hors foyer.
PROPOS RECUEILLIS PAR CLAIRE HUE
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